Le terme “agitation de l’allaitement” ou “angoise de l’allaitement” a été défini comme un refus inconscient et irrationnel d’allaiter l’enfant au sein. Un sentiment que la mère ressent violemment, et qui vient de l’intérieur, des tripes. On l’appelle aussi Réflexe dysphorique d’éjection du lait.
Vous pouvez le ressentir comme un rejet si fort que vous ressentez le besoin de séparer physiquement le bébé de vous de manière violente. Et cela est non seulement très surprenant mais aussi très envahissant.
Ce phénomène très peu connu est vécu par de nombreuses mères en silence et s’accompagne de sentiments de culpabilité et de honte.
C’est un besoin incontrôlable, une sensation insupportable et très désagréable que la mère doit fuir et ne plus percevoir.
La cause de l’apparition de l’agitation liée à l’allaitement n’a pas encore été clairement établie, mais tout porte à croire à une composante hormonale et biologique. Aucune donnée d’incidence ou de prévalence n’est disponible.
Bien que les sentiments négatifs liés à l’allaitement soient généralement difficiles à exprimer pour les mères, beaucoup d’entre elles l’expliquent souvent comme “une crampe nerveuse, un picotement qui parcourt mon corps, une sensation que je dois fuir ou retirer mon bébé immédiatement”, “ce n’est pas une douleur, c’est quelque chose de bien pire”.
On pense que l’agitation liée à l’allaitement est principalement causée par une composante hormonale et qu’il s’agirait d’un mécanisme instinctif des mammifères qui nous “force” à vouloir sevrer.
Nous ne connaissons pas vraiment les raisons de ces sentiments et sensations, mais on pense qu’ils pourraient être basés sur le besoin inconscient d’accélérer la croissance de nos bébés. Une forme de défense biologique qui appelle aussi à la récupération de notre corps, pour nous. De la même manière que les oiseaux femelles encouragent leurs poussins à quitter le nid, nous avons besoin, à un certain moment de la lactation, qu’ils grandissent.
Dans mon cas, je l’ai vécu avec une énorme violence jusqu’à 4 fois, avec chacun de mes enfants. À chaque fois que j’étais enceinte au même temps que j’allaité, il réapparaissait.
J’ai eu la chance de pouvoir l’expliquer grâce à des informations dès le premier jour ou presque.
La première chose qu’une mère qui souffre d’agitation d’allaitement doit savoir est que c’est normal et que ce n’est ni sa faute ni celle de son bébé.
Nous, les mères qui souffrons d’agitation, nous sentons terriblement mal, nous ne pouvons pas comprendre comment il est possible de ressentir ce rejet envers nos enfants et, très souvent, nous avons honte de l’admettre, si bien que nous n’osons souvent pas demander de l’aide et avons tendance à gérer le problème seules.
La mère ne comprend pas pourquoi elle sent cette sensation de rejet extremme de son corps pour son bébé lors de l’allaitement, ce qui la rend encore plus anxieuse, redoutant même le moment où le bébé réclame le sein. Toutes les mères peuvent souffrir d’agitation à un moment ou à un autre de l’allaitement, mais cela ne signifie pas que toutes les mères y passeront.
Il a tendance à se produire :
- chez les mères d’enfants d’un 1 an et plus (bien qu’il n’ait pas été associé à un âge spécifique),
- et est souvent associé à la grossesse (il touche plus d’un tiers des femmes qui allaitent pendant la grossesse),
- à l’allaitement en tandem (elles se sentent le rejet lorsqu’elles allaitent leur enfant plus âgé, bien qu’il puisse également se produire chez les mères qui n’allaitent qu’un seul enfant)
- et qui aussi peut apparetre plus intensement pendant les menstruations ou à l’ovulation.
- Il a également été associé à un profil temporel, n’apparaissant parfois qu’à certaines tétées, généralement la nuit,
et disparaissant généralement avec le temps. Cependant, dans d’autres cas, cette sensation persiste et la mère finit par quitter le sein.
Que puis-je faire pour y faire face ?
Si vous souffrez du rejet pour votre enfant, tout d’abord, mettez de côté la culpabilité – ce n’est pas quelque chose de rationnel que vous pouvez éviter. Tu le sens, point final.
Réfléchissez avant tout à ce que vous voulez faire. Vous saurez ainsi s’il est plus approprié pour vous de sevrer ou d’essayer de poursuivre l’allaitement, avec de petites astuces:
- Essayez de limiter, de reporter ou d’écourter les tétées, ce sera plus facile lorsque votre bébé acceptera de négocier.
- Essayez de distraire votre esprit pendant les tétées : lire un livre, écouter de la musique…
- Demandez l’aide de votre famille pour s’occuper de votre enfant lorsque vous ne vous sentez pas bien.
- Exprimez vos sentiments à d’autres mères ou à des conseillers qui peuvent vous comprendre.
- Réduire ou supprimer les tétées nocturnes
Il a été démontré que, dès leur plus jeune âge, les enfants perçoivent et comprennent qu’ils sont l’une des parties impliquées dans l’allaitement. Il faut donc leur expliquer ce qui se passe et ce que ressent la mère, afin qu’ils ne perçoivent pas l’agitation comme un rejet maternel.
La mère doit savoir que les enfants perçoivent le rejet et ne comprennent pas ce qui se passe. Le bébé a aussi besoin de comprendre nos reactions.
En outre, la mère doit savoir que cette situation a également tendance à générer de l’anxiété chez notre enfant et, par conséquent, peut augmenter la fréquence et l’intensité des tétées, car il a tendance à avoir peur de perdre sa mère et ressent donc le besoin d’être plus proche d’elle.
Ce n’est pas parce que l’allaitement nocturne prend fin que notre bébé va dormir toute la nuit sans réveils nocturnes. Il est important de préciser que les réveils nocturnes ne sont pas liés à l’allaitement, mais à l’évolution de la maturation du cerveau du bébé.
Près de 50 % des enfants jusqu’à l’âge de 3 ans ont au moins un réveil nocturne régulier ou irrégulier. Le besoin de sécurité et de soutien au début du sommeil sera toujours important.
Comme pour tout en tas de situations, il est donc conseillé de parler à l’enfant, de lui expliquer ce que nous on ressent et comment on va agir : par exemple, on peut lui dire que lors des tétées nocturnes, on ne se sent pas à l’aise, on se sent contrariée et qu’il vaut mieux qu’elles soient des tétées courtes (par exemple : on va compter jusqu’à 10 et c’est tout, OK ?).
Il est important de lui rappeler que nous l’aimons beaucoup (affection supplémentaire) et que ce qui se passe n’est pas de sa faute.
Rappelez-vous que, bien que l’enfant soit jeune, il comprend les sentiments de sa mère et ce qui se passe ; de plus, il se comportent généralement de manière très compréhensive et généreuse. Il est donc nécessaire d’expliquer à tout moment ce qui se passe à l’enfant.
Les enfants ont aussi le droit de se fâcher ou de se sentir tristes. Valider ses emotions c’est important! Ils ont besoin d’entendre que même si nous ne les allaitons : On les aime énormément et pour toujours !
Sources:
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